Face à la douleur
La douleur ne me quitte pas un instant
depuis qu’un jour au matin innocent,
visiteuse inattendue, elle s’est imposée.
Elle a forcé ma porte, a tout bousculé,
A conquis sa place, toute la place.
Elle a fouillé tous les coins de mon être,
brutalement, sans pudeur, sans merci.
Docteur, vous m’expliquer « la » douleur,
ce n’est qu’une caricature de « ma » douleur,
lutte inexprimable, ennemie cachée.
Ce mal qui m’envahit, qui m’isole
du monde extérieur, pire, de moi-même.
Il n’a pas de sens, il n’a pas le droit
d’empoisonner mon bonheur gratuit.
Contre ce mal, je réagis mal.
Sans défense, je panique, je fuis, je nie :
j’ai si peur de ces éclair aveugles.
Mon « moi » se rétrécit, est supprimé,
je ne me reconnais plus, je me cache.
Cette douleur, je ne peux en parler,
Elle fait de moi sa proie, son secret.
Soudain tu es venue, revenue me trouver
Jusqu’à ce que j’accepte le face à face
avec le quotidien : en fleur et en pleurs.
Tu souris autrement que les blouses blanches
et tu ne prétends pas tout comprendre.
Sans le savoir, tu me rappelles le Christ :
la souffrance ne te répugne pas, tu la portes.
L’amour me travaille sans se lasser.
Sa présence, souvent silencieuse, me libère
non pas de mon mal inextricable,
mais de cette nuit de solitude, d’angoisse.
Si la douleur, astucieuse, échappe à la parole,
la peine, elle, se communique, langage du cœur.
C’est qu’amour et souffrance se frôlent.
Je suis aimée ! Du coup, malgré moi, j’aime,
je redécouvre, j’accueille, je ris, je prie.
A mon mal je cède une place, je l’apprivoise.
Peu à peu, esclave, je me libère du maître,
je ne le subis plus comme l’intrus,
mais comme part de moi, membre rebelle,
contre-jour, tranché sur la Lumière de Pâques.
Pourtant, ma douleur ne me quitte pas un instant….